Depuis la signature de l’accord commercial avec l’Union européenne en 2017, l’Équateur connaît une forte progression de ses exportations, et la France est devenue le cinquième marché importateur de produits équatoriens au sein de l’UE. Au-delà des échanges commerciaux, les deux pays partagent des valeurs communes liées à la protection de l’environnement et à la promotion d’une économie durable. Véritable pont entre la France et l’Équateur, l’ambassadrice équatorienne à Paris, Yvonne Abaki, nous livre son éclairage sur la relation bilatérale qui unit ces deux pays.
Quels sont précisément les principaux produits que l’Équateur exporte vers la France, et en quoi ces échanges sont-ils stratégiques pour votre pays ?
IAB : Parmi nos principaux produits phares, vous retrouvez bien sûr les crevettes, où l’Équateur est le principal fournisseur en France. Nous vendons également du thon, des roses très appréciées pour leur qualité et leur longévité, ainsi que notre cacao, considéré comme l’un des meilleurs du monde grâce à des conditions de culture idéales. Ces filières génèrent une importante valeur ajoutée pour l’Équateur, tant sur le plan économique que social, en assurant des emplois durables aux agriculteurs, pêcheurs et entrepreneurs locaux. Pour nous, la France est un marché prioritaire, car elle offre de belles opportunités de croissance dans ces secteurs clés.
Justement, les roses équatoriennes semblent bénéficier d’une solide réputation. Pourquoi sont-elles si appréciées, notamment en France ?
IAB : Nous avons la chance d’être situés en plein sur la ligne équatoriale. Cela implique une durée d’ensoleillement stable et une température quasi constante aux alentours de 23-25 °C. Les roses poussent donc plus grandes, plus robustes et conservent leur fraîcheur beaucoup plus longtemps. Cette particularité est un véritable atout sur le marché international : nos roses ont conquis les fleuristes et les consommateurs français, qui recherchent des bouquets à la fois esthétiques et résistants. Cela contribue aussi à renforcer l’image de l’Équateur comme un pays à la biodiversité exceptionnelle et aux conditions naturelles uniques.
Au-delà des exportations de produits agricoles ou floraux, comment l’Équateur et la France coopèrent-ils en matière de développement durable et de protection de l’environnement ?
IAB :Depuis plusieurs années, nos deux gouvernements ont multiplié les initiatives communes. Nous sommes conscients, tant du côté équatorien que du côté français, de la nécessité de préserver les écosystèmes, en particulier l’Amazonie. Le président équatorien et le président Macron ont échangé à ce sujet, évoquant notamment l’idée de créer un « corridor amazonien » pour protéger la plus grande forêt tropicale du monde. L’Équateur a déjà réalisé un vaste projet de conversion de dette visant à financer la protection des îles Galápagos, et nous prévoyons d’étendre des mesures similaires à d’autres régions sensibles. Les entreprises françaises, de leur côté, sont encouragées à investir dans des projets verts, dans le tourisme responsable ou encore dans l’énergie renouvelable, ce qui renforce la dimension durable de notre partenariat
L’Amazonie équatorienne est souvent décrite comme l’un des « poumons de la planète ». Qu’est-ce qui la rend si cruciale, non seulement pour votre pays, mais aussi pour le reste du monde ?
IAB : En effet, l’Amazonie équatorienne possède l’une des biodiversités les plus denses au monde. La zone du parc national Yasuni, par exemple, s’étend sur plus de 10 000 km² et abrite des milliers d’espèces végétales et animales, dont certaines n’existent nulle part ailleurs. Cette richesse naturelle est indispensable pour réguler le climat, stocker du carbone et maintenir l’équilibre écologique mondial. Or, l’Amazonie est confrontée à de multiples menaces : déforestation, trafic de drogues, exploitation minière illégale. C’est pourquoi nous cherchons le soutien international, notamment celui de la France, pour financer la protection de cette région et encourager une exploitation responsable des ressources, quand cela est nécessaire.
Vous évoquez le trafic de stupéfiants. Quelles conséquences ce phénomène a-t-il sur la sécurité et l’économie en Équateur ? Et dans quelle mesure la coopération avec la France peut-elle aider ?
IAB :Le trafic de drogue, particulièrement de cocaïne, a des répercussions majeures sur la sécurité de notre pays. Les narcotrafiquants utilisent parfois des routes clandestines qui traversent des zones écologiquement fragiles, comme l’Amazonie, ce qui dégrade l’environnement et accentue l’insécurité pour les communautés locales. Sur le plan économique, cela peut ternir l’image de l’Équateur et nuire à nos échanges commerciaux. Nous travaillons donc main dans la main avec la France et l’Union européenne pour mieux contrôler ces flux et échanger des informations policières. Cette coopération est indispensable pour garantir la stabilité de la région et pour protéger les filières d’exportation légitimes de tout impact négatif.
Pour conclure, quelles perspectives envisagez-vous pour les relations économiques franco-équatoriennes dans les années à venir ?
IAB :Nous souhaitons d’abord consolider nos exportations traditionnelles – crevettes, thon, roses, cacao – afin de mieux répondre à la demande d’un marché français soucieux de qualité et de traçabilité. À plus long terme, nous aimerions développer de nouveaux secteurs collaboratifs comme le tourisme éco-responsable, l’agriculture durable, la haute technologie et les énergies renouvelables. Nous avons aussi pour ambition d’attirer davantage d’investissements français en Équateur, grâce à des incitations fiscales et à l’amélioration constante de nos infrastructures. Enfin, nous prévoyons de renforcer nos liens académiques et scientifiques, afin de favoriser les échanges d’expertise et d’innovation. L’enjeu est de construire ensemble une prospérité partagée, tout en protégeant la biodiversité unique de l’Équateur et en soutenant les populations locales.
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