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En matière de climat, l’AMF pose des jalons

Le Rapport 2022 de l’AMF sur « Le gouvernement d’entreprises et la rémunération des dirigeants des sociétés cotées », publié le 1er décembre, a pris le parti de donner au sujet climatique une place prépondérante. On ne peut que l’en féliciter tant ce rapport est attendu et ausculté avec attention par la Place, offrant une formidable opportunité au régulateur de discipliner le marché sur des sujets structurants. Cet engagement constitue une prise de conscience essentielle, qui invite les acteurs économiques à poursuivre leurs efforts.

 

Plusieurs recommandations sont formulées, notamment à l’adresse des conseils d’administration et si certaines d’entre elles restent timides, elles n’en sont pas moins indispensables et urgentes. 

Ainsi, le rapport reconnaît que « compte tenu de la montée en puissance, en droit et en fait, des enjeux RSE et notamment climatiques, la mise en place, sur ces sujets, de formations dédiées aux administrateurs apparaît de plus en plus s’imposer ». Il souligne aussi qu’une bonne pratique en la matière consiste à rendre cette formation « régulière », doublée d’un « programme de formation pour les administrateurs nouvellement nommés ».

Le rapport fait aussi la part belle aux résolutions dites climatiques dans la partie relative aux assemblées générales. Il rappelle utilement que « si les attentes des investisseurs sont importantes en matière de transparence sur les sujets environnementaux, notamment climatiques, il n’existe pas de consensus, parmi les investisseurs, sur l’opportunité ou les modalités du say on climate ». En tout état de cause, il n’est pas certain que les entreprises puissent continuer encore longtemps de se retrancher derrière la querelle de compétence en matière de say on climate

 

Cependant, malgré ces avancées qui doivent être saluées, le rapport de l’AMF partage avec de nombreux acteurs économiques une scorie conceptuelle importante qu’il semble nécessaire de dépasser.

En effet, le régulateur continue d’intégrer la question climatique à la RSE, dans un rapport « contenant-contenu » qui contourne la véritable nature du sujet et ignore que la transition bas-carbone ne relève pas de la responsabilité de l’entreprise mais de son existence et de sa nature mêmes : parce qu’elle conditionne de plus en plus les processus de production industrielle, la direction des programmes de R&D, les performances financières et la réputation des entreprises, cette transition est sans aucun doute un enjeu de stratégie et non de RSE.

Ainsi, la question à se poser ne doit plus être « Comment diminuer mon impact sur le climat ? » mais de façon plus fondamentale : « Quelle sera mon activité dans un monde bas-carbone ? ».

 

La désincarcération du sujet environnemental de la RSE ôterait à cette dernière une grande partie de son importance et dans une certaine mesure, de son intérêt. Elle améliorerait pourtant le débat entre les émetteurs et les investisseurs, inquiets de se voir régulièrement opposer des solutions « RSE/ESG » à un problème qu’ils ont déjà largement identifié comme industriel. Sur ce point, on peut d’ailleurs relever le paradoxe de certains émetteurs à traiter le sujet environnemental comme relevant de la RSE dans certains cas et de stratégique dans d’autres, lorsqu’il s’agit de s’opposer au dépôt de « résolutions climat ».

 

Le changement climatique est certainement la plus grande défaillance de marché jamais constatée. Il doit être placé au cœur de la stratégie des entreprises, dans leurs projections à court, moyen et long terme et intégré à tous leurs schémas de performance : c’est l’ultime étape dans le cheminement itératif de l’AMF, qui pourrait en faire un pilier de son Rapport pour 2023.

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