Combien d’entreprises des années 1990 demeurent dans le paysage économique français de 2018 ? On se souvient de Mammouth, Prisunic ou Moulinex… Aux Etats-Unis, c’est plus de la moitié des entreprises qui constituaient le Fortune 500 en l’an 2000 qui ne font aujourd’hui plus partie du classement. C’est un fait : les nouveaux modèles économiques ont remis en question les fondamentaux que les dirigeants d’entreprises ont longtemps tenus pour acquis. C’est toute la relation client que les organisations doivent repenser et faire évoluer pour ne pas disparaître purement et simplement de leurs marchés. Dans ce contexte, l’abonnement semble s’imposer comme moyen privilégié d’entretenir avec le consommateur une relation mutuellement profitable.
La mise à distance du client n’est plus une posture acceptable
Un péché d’orgueil encore répandu aujourd’hui est de penser que le client écoute passivement le discours des marques et, sans broncher, accueille favorablement les nouveaux produits et services que ces dernières auront développés « d’en haut ». Bien souvent, les entreprises négligent d’observer comment les consommateurs utilisent réellement leurs offres, et répugnent à recueillir les enseignements qu’elles pourraient tirer des retours négatifs. Comme l’ont justement dit à ce sujet Michael Ballé et Godefroy Beauvallet dans Le Management Lean, « Le service client est souvent occupé à expliquer au client que si le produit ne fonctionne pas comme il le souhaite, c’est au fond de sa faute ». De fait, les entreprises traditionnelles pensent l’innovation d’un point de vue techno-centré, au risque de perdre de vue sa finalité. C’est exactement ce qu’il s’est passé avec les kits photovoltaïques montés dans les pays en développement dans les années 1980 : pour les ingénieurs de l’époque, la fiabilité technique primait de loin sur l’adaptation aux usages. Ils appliquaient toujours, 50 ans plus tard, la maxime de l’exposition universelle tenue à Chicago en 1933 : « La science découvre, l’industrie applique et l’homme suit » …
Cette posture hautaine, toujours d’actualité, est la principale menace des entreprises. Comme l’explique Tien Tzuo dans son ouvrage « Subscribed : Why the Subscription Model will be your company’s future and what to do about it », le client doit être le point de départ de toute organisation. C’est ce qui fait le succès d’un Amazon ou d’un Salesforce, qui ont, mieux que leurs concurrents, réussi à comprendre l’état d’esprit de leurs cibles. Les mastodontes du web ont pour cela employé un moyen aussi simple qu’efficace : établir avec elles des relations directes et suivies.
L’abonnement comme réponse aux impératifs contemporains
De fait, l’implication du client est décisive. De plus en plus, celui-ci co-crée avec les entreprises les produits et services de demain. Il est même prêt à céder une partie de ses données dans la perspective de bénéficier d’offres personnalisées ! L’économie de l’abonnement apparaît dès lors comme un passage incontournable : en effet, elle engage les marques dans un mode relationnel qui leur permet de mieux comprendre leurs clients et d’affiner leurs offres dans le temps.
Il s’agit là de la seule stratégie viable, à l’heure où tout avantage concurrentiel devient très vite obsolète. Liberté, flexibilité et absence de contrainte sont les trois grandes exigences d’un consommateur qui a littéralement pris le pouvoir. Le business model de l’abonnement est actuellement le mieux à même de répondre à ces impératifs. Les constructeurs automobiles commencent à le comprendre. Mike O’Brien explique ainsi que la vocation de Hyundai, dont il est vice-président de la production produit, est de « rendre la possession d’une voiture aussi simple que celle d’un appareil mobile ». Il est désormais possible de souscrire des abonnements auprès de marques automobiles. Par rapport à la location, ce système a le double avantage d’épargner à l’utilisateur les contraintes usuelles (administrations, assurance, maintenance) et de lui faire bénéficier du véhicule dont il a besoin au moment où il en a besoin. Le champ des possibles lui est ouvert, et c’est précisément ce qu’il réclame.
Une réorganisation en profondeur des business models
Les entreprises ne pourront adopter cette posture d’écoute sans revoir radicalement leur philosophie et leur organisation. Il leur faudra entrer dans l’économie du quaternaire décrite par Michèle Dubonneuil en 2007 dans L’Espoir Economique – alors en avance de phase. De plus en plus, « les services vont s’articuler autour des biens et des lieux pour constituer des produits complexes mais intégrés, simples d’utilisation et finement adaptés à la demande. (…) La frontière entre les biens et les services s’estompe, et laisse place à des rapprochements et des synergies. ». Ces produits intégrés sont aujourd’hui réalité : ils prennent la forme d’objets connectés et fonctionnent sur un modèle d’abonnement. Dès 2020, leur nombre s’élèvera à plus de 50 milliards (source : Gartner et Idate).
De ces mutations, les entreprises doivent tirer les conclusions qui s’imposent : collaborer avec l’ensemble de leur écosystème, et entrer dans un processus d’innovation continue. Ce changement de paradigme, de prime abord insécurisant, est aussi une chance pour elles de se remettre en question et de donner le meilleur. C’est la force – et la nécessité – du business model de l’abonnement.
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