Lors de son intervention le 15 octobre au Cercle International de Neuilly-sur-Seine, la première invitée de l’année de cette rencontre mensuelle organisée par le maire Jean-Christophe Fromantin, Samira Sitaïl, véritable trait d’union entre Paris et Rabat depuis sa nomination, s’est exprimée avec fermeté, posant un cadre sans complaisance pour la relation franco-marocaine. Elle n’a pas hésité à aborder les enjeux diplomatiques, économiques et sécuritaires d’une relation essentielle et qu’elle considère comme un partenariat stratégique à moderniser et à solidifier. Avec une volonté assumée de reconstruire un avenir commun, Samira Sitaïl affirme sa vision d’une coopération bilatérale renouvelée, fondée sur des bases d’égalité solides, signe d’une amitié de longue date.
Alors que la visite d’Emmanuel Macron au Maroc se profile – la première en sept ans, qualifiée de « visite historique » —, Samira Sitaïl, ambassadrice du Maroc en France, se montre ferme et déterminée à renforcer une relation ancienne mais abîmée entre les deux nations. Sans filtre sur les sujets qui ont pu entacher les relations entre Rabat et Paris, cette ex-journaliste à l’autorité naturelle occupe la scène qui lui est offerte.
Des liens économiques puissants, une diaspora effervescente.
Quand Samira Sitaïl parle d’économie, elle ne s’encombre pas de demi-mesures. « Nous ne sommes plus seulement des partenaires, mais des alliés économiques de premier plan », a-t-elle martelé lors de son discours, balayant d’un revers de main les hésitations diplomatiques passées. Et elle n’a pas tort : aujourd’hui, « plus de 800 entreprises marocaines opèrent en France », des acteurs économiques clés dans des secteurs variés, de la technologie aux services financiers, en passant par l’agroalimentaire. « Nous sommes partout », glisse-t-elle avec une pointe d’ironie, insistant sur la forte présence marocaine sur le marché français. Mieux encore, le Maroc est désormais « le premier investisseur africain en France », un statut qui souligne la montée en puissance de ses entreprises au cœur de l’économie française.
La France n’est évidemment pas en reste. « Les entreprises françaises au Maroc sont des piliers de notre développement, » a précisé Sitaïl. Des géants tels que TotalEnergies ou Bouygues continuent d’investir massivement dans des secteurs stratégiques. « La France est aujourd’hui le premier investisseur étranger au Maroc, avec plus de 8 milliards d’euros », souligne-t-elle, rappelant que « pratiquement toutes les entreprises du CAC40 sont présentes sur le territoire marocain ». Ces investissements, loin d’être symboliques, génèrent « plus de 80 000 emplois », impactant directement le développement du Maroc.
Mais cette relation va bien au-delà des simples chiffres financiers. Elle repose aussi sur un échange humain et culturel vibrant. « Nous comptons une diaspora d’environ 6 millions de Marocains en France, souvent binationaux« , affirme l’ambassadrice, une diaspora qu’elle qualifie « d’incontournable » et qui propulse les échanges commerciaux au cœur des relations bilatérales. Ces liens culturels sont renforcés par l’éducation : en 2023, « plus de 53 000 étudiants marocains sont inscrits dans des établissements français, » un nombre qui reflète non seulement l’attrait de la France pour les élites marocaines, mais aussi la « force vive » que représente cette jeunesse formée à l’international. « Chaque étudiant marocain en France est une victoire pour nos deux nations », s’enthousiasme l’ambassadrice.
Le message est sans équivoque : « Ce partenariat, il est solide, il est là pour durer », martèle-t-elle avec force, tout en insistant sur la nécessité d’une « véritable co-construction ». « La France et le Maroc ont tout à gagner à travailler ensemble, et les opportunités d’affaires sont aussi larges que notre vision commune. » Une vision qui, selon Sitaïl, ne doit pas se reposer sur ses lauriers, mais au contraire, se renforcer et évoluer, en s’appuyant sur « des bases solides » pour construire un avenir commun fondé sur « l’amitié et le respect mutuel. »
Diplomatie, sécurité et coopération constructive
Lorsque Samira Sitaïl évoque la sécurité, elle le fait avec la clarté et l’expérience d’une ancienne journaliste chevronnée. « Le Maroc et la France sont partenaires dans la lutte contre le terrorisme », a-t-elle affirmé calmement, rappelant l’importance de cette collaboration après les attentats de 2015. Elle a tenu à souligner la coopération étroite des deux pays, notamment à travers le partage de renseignements, qui a permis de contrer des menaces majeures. Les services marocains, régulièrement salués pour leur efficacité, sont un acteur clé dans cette lutte commune.
Sitaïl a insisté sur l’importance de cette collaboration, tout en la replaçant dans le cadre d’un partenariat équilibré. « Ce n’est pas une relation à sens unique, mais un échange mutuel de savoir-faire et de ressources », a-t-elle déclaré avec fermeté. Ici, elle met l’accent sur le respect mutuel et la complémentarité des efforts entre les deux pays.
Loin de se défiler devant la question, Samira Sitaïl aborde la question des OQTF (obligation de quitter le territoire français) avec fermeté : « Nous collaborons avec la France pour gérer cette question de manière juste et respectueuse », a-t-elle expliqué. Avec l’assurance qu’n lui connait, elle a éludé les défis inhérents à cette problématique mais a souligné que, sur le terrain, le Maroc avait déjà démontré son engagement. « Le Maroc a fait, et continuera à faire, sa part dans l’identification des personnes concernées et la délivrance de laissez-passer pour les rapatriements, » a-t-elle expliqué, rappelant que ce processus reste délicat mais nécessaire.
Sur la question du Sahara occidental, l’ambassadrice n’a pas cherché ses mots : « Le Sahara est marocain, point final. » C’est dit avec calme mais détermination, réaffirmant la position du Royaume sans pour autant entrer dans la surenchère. Une posture claire, assumée, qui montre bien que sur ce sujet, il n’y aura pas de demi-mesures.
L’avenir des relations franco-marocaines ? Samira Sitaïl le décrit comme un véritable renouveau. « La prochaine visite de Macron est une opportunité historique, » dit-elle avec un sourire. Après plusieurs années de tensions diplomatiques, cette rencontre symbolise un climat « détendu et prometteur », comme elle le qualifie elle-même. Et surtout, elle mise sur la co-construction, cette vision partagée où les deux pays avancent ensemble, avant de finir son allocution par nous rappeler que « ce partenariat est plus solide que jamais. »
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