Tribune d’Olivier de Panafieu, co-Managing Partner de Roland Berger à Paris.
Il est urgent de renforcer notre tissu de PME pour les transformer en grandes ETI européennes, en s’inspirant du modèle allemand. Ce nouveau paysage pourrait voir le jour à condition d’accroître les fonds propres des PME en fléchant une partie de l’épargne des Français.
L’Allemagne a su accompagner et faire grandir ses moyennes entreprises pour qu’elles s’emparent de nouveaux marchés à travers le monde. Aujourd’hui, ce tissu est l’épine dorsale de l’économie du pays. En France nos 138.000 PME peinent à grandir et à muer en ETI, aujourd’hui au nombre de 5.400, soit deux à trois fois moins qu’en Allemagne ou au Royaume-Uni. Développer nos PME aboutira à d’importantes créations d’emplois qui auront des effets positifs sur les dépenses publiques, en résorbant notamment les dépenses liées à l’assurance chômage.
Cette ambition pour nos PME s’articule autour de trois piliers: le financement, le développement et la transmission.
Comment redynamiser chacun de ces socles ? Faciliter la transmission de ces entreprises est l’une des réponses centrales pour faire naître un tissu robuste grâce à des fusions, véritable facteur de croissance. Si investir dans des PME semble attractif, le fait qu’elles soient non cotées leur confère peu de notoriété aux yeux du grand public. D’autant qu’elles représentent un investissement plus risqué.
Il est donc primordial de créer un nouvel environnement législatif qui inciterait les Français à miser sur elles. Celui-ci passerait par une mutualisation des risques qui prendrait la forme d’un portefeuille de plusieurs PME. Cet accompagnement «à l’entrée» doit trouver son pareil «à la sortie», et ce sans faire l’objet d’un impôt confiscatoire pour ne pas décourager les investisseurs potentiels. Sans cet écosystème vertueux, les investissements s’orienteraient vers des PME très stables avec un faible potentiel de plus-value.
Nous sommes aujourd’hui à l’aune d’une transformation d’ampleur avec la réforme de l’ISF entérinée à l’automne dernier.
La suppression de cet impôt a mis fin à des effets néfastes et permettra à terme de renforcer notre tissu de PME, notamment en redonnant aux contribuables de cet impôt des capacités d’investissements. Néanmoins, à court terme, nos PME vont faire face à un trou d’air de financement avec la disparition de l’ISF-PME, un mécanisme qui fléchait vers celles-ci une part de cet impôt par un levier de défiscalisation favorable à l’investisseur.
Cette incitation fiscale à destination des PME a permis de collecter 1,2 milliard d’euros en 2016. Depuis 2010, ce sont 4.700 de ces entreprises qui ont pu bénéficier de ce levier de croissance pour un total de 6 milliards d’euros. Chaque année, ce sont près de 8.000 emplois créés ou sauvegardés, et 128 millions d’euros d’économies générés sur les dépenses publiques. Ainsi, il est nécessaire d’avoir une réflexion sur les moyens compensatoires à mettre en œuvre afin d’éviter des pertes sèches pour nos fleurons de demain.
Le gouvernement a bien saisi la problématique de cette carence de financement et a donc mis en place un nouveau dispositif: l’IFI-PME. Néanmoins, celui-ci n’a pas vocation à être maintenu au-delà de cette année 2018. Les pouvoirs publics ont par ailleurs créé le fonds d’innovation, piloté par Bpifrance, qui a pour objectif d’atteindre 10 milliards d’euros grâce aux cessions de l’Etat. Au rythme de 300 millions d’euros par an, cette collecte est quatre fois inférieure à celle de l’ISF-PME. Il est donc impératif de réfléchir à un nouveau système pérenne.
Nous proposons plusieurs pistes : relever le plafond et le taux de l’IR-PME, relancer le programme France Investissement à destination des petites entreprises, libérer le PEA-PME et les financements participatifs – crowdfunding et crowdlending – mais aussi créer des produits financiers en réorientant l’assurance-vie et l’épargne-retraite, sont autant de propositions de réformes qui garantiraient la croissance de nos PME en ETI. Aux pouvoir publics de s’en saisir.
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