Un genou à terre. Si le coronavirus est d’abord une crise sanitaire d’ampleur exceptionnelle, il représente aussi un choc majeur pour notre économie. A côté des grandes entreprises dont la valeur est sérieusement attaquée depuis plusieurs jours sur les marchés financiers, ce sont d’abord les PME qui sont exposées compte tenu d’une trésorerie plus fragile et parfois d’un endettement déjà élevé.
Dans certains secteurs comme les transports, l’événementiel, le commerce ou encore les agences de voyage dont l’activité est mise à mal par l’effondrement des échanges mondiaux, c’est parfois jusqu’à 80 à 90% de chiffre d’affaires en moins. Des perturbations d’une ampleur inégalée et qui s’apparentent à une réplique spectaculaire après le manque à gagner qu’avait déjà représenté, pour certains, le séisme des grèves au moment du débat sur les retraites en décembre dernier.
Les pouvoirs publics ont très vite réagi dans notre pays, le président de la République n’hésitant pas à s’engager devant les Français le 12 mars dernier à protéger « quoi qu’il en coûte » les entreprises percutées par les impacts en chaîne de l’épidémie. Entre un mécanisme exceptionnel de chômage partiel pris en charge à 100% par l’Etat, le report sans justification ni pénalité du paiement des impôts et cotisations dus en mars, la création d’un « fonds de solidarité » ou encore la mise en place d’un dispositif de garantie d’Etat à hauteur de 300 milliards d’euros pour les prêts accordés par les banques aux entreprises touchées de plein fouet par la crise du coronavirus, le gouvernement et ses opérateurs, comme BPI France, sont au chevet de notre tissu productif.
Aussi vertueux soient les mécanismes d’appui ainsi annoncés, nous savons qu’ils ne suffiront pas à permettre aux entreprises de petite taille, confrontées à un reflux commercial sans précédent depuis la crise de 2008, de résister.
C’est pourquoi, la solidarité publique actuellement orchestrée par l’Etat devra impérativement être relayée par un mouvement tout aussi fort d’entre-aide entre les entreprises elles-mêmes, afin d’aider les plus vulnérables d’entre elles à tenir bon avant de rebondir une fois l’environnement des affaires revenu à la normale, sans doute après l’été.
Or, à ce stade la dégradation généralisée de l’activité économique fait craindre une exposition renforcée des PME si plusieurs grands donneurs d’ordres venaient à répercuter sur leurs sous-traitants leurs propres contraintes : annulation sèche de commandes, application de pénalités de retard et/ou de frais de dossier, allongement des délais de paiement, etc.
Face à ce risque de mauvais comportements, il faut réagir et se mobiliser ! C’est le sens de la décision prise conjointement le 23 mars dernier par le ministre de l’Economie et des Finances, M. Bruno Le Maire et le gouverneur de la Banque de France, M. François Villeroy de Galhau, d’installer une cellule de crise. Placée sous la double régulation opérationnelle de la Médiation des entreprises et de la Médiation du crédit, elle sera tout particulièrement chargée de détecter puis de traiter en temps réel les cas les plus graves en matière de détérioration du crédit inter-entreprises.
Un peu plus tôt, la direction des achats de l’Etat à Bercy avait largement diffusé aux principaux acheteurs de l’Etat et de ses établissements publics de nouvelles consignes, en vue de soutenir l’activité des entreprises dans la crise. Parmi celles-ci, l’invitation à accorder aux titulaires de marchés empêchés du fait de l’épidémie d’exécuter le contrat une prolongation des délais d’exécution. Ou encore la renonciation aux pénalités de retard, dès lors que ce dernier résulterait des mesures de restrictions imposées par le gouvernement.
Dans le présent combat mené pour amortir le choc économique de grande ampleur subi par les entreprises de toute taille de notre pays, aucune voix ne doit manquer !
Mal se comporter à l’égard de ses fournisseurs et de ses partenaires serait d’ailleurs se tirer une balle dans le pied : fragiliser sa chaîne de valeur reviendrait en réalité à pénaliser sa propre capacité de production et d’innovation, compte tenu du poids des PME dans l’une et l’autre pour les grands groupes.
On ne le dira jamais assez : la présente crise est un avertissement adressé à ceux qui auraient encore l’illusion de pouvoir s’affranchir des règles collaboratives. La solidarité inter-entreprises, que promeut tout particulièrement l’association Pacte PME -créée dix ans plus tôt à l’occasion d’une précédente crise par un grand patron industriel de l’époque, Henri Lachmann (Schneider Electric) – est la voie unique à suivre pour garantir le rebond de notre économie dès la prochaine rentrée 2020.
Le premier devoir de chaque grand groupe et de chaque ETI à l’égard des petites et moyennes entreprises, c’est d’abord d’honorer leurs règlements à leur égard dans les temps !
L’autre appui que les sociétés du CAC 40 et du SBF 120 peuvent apporter aux entreprises de plus petite taille qu’elles, c’est de confirmer leurs achats en cours dans leur direction, afin de ne pas dégrader davantage leur carnet de commandes.
Œuvrer pour limiter la casse au niveau des ventes des entreprises de moins de 250 salariés auprès des plus grands groupes, c’est finalement contribuer au maintien au moins partiel de leur activité et in fine de l’emploi.
Le destin de nos plus grandes entreprises et de celles qui les rejoindront demain au sommet de la pyramide productive – les entreprises de taille intermédiaire et les petites et moyennes entreprises- n’a peut-être jamais été aussi lié que dans les circonstances exceptionnelles que nous vivons.
A côté de tous les maux économiques et financiers qui vont mécaniquement accompagner l’épidémie de covid-19 et que nous pouvons au mieux amortir, je formule un vœu: que la crise resserre plus que jamais les liens collaboratifs entre nos entreprises, petites et plus grandes.
Avec des cycles d’innovation raccourcis et une compétition internationale qui continuera de s’intensifier, cette dynamique coopérative correspond bien à l’intérêt commun des PME, des ETI et des grands groupes. Demain, l’entreprise sera solidaire ou ne sera pas.
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