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Conjuguer souveraineté économique et liberté économique

Concept de plus en plus en vogue à l’heure où l’on parle de démondialisation, la souveraineté vient interférer dans le jeu de la libre concurrence en créant une incertitude de plus pour les acteurs économiques.

Dans un monde où la compétition économique est la norme, le jeu de la concurrence pure et parfaite est parfois dévoyé par des pratiques tacites ou implicites qui faussent le jeu concurrentiel dans des proportions qui nuisent à l’économie d’un pays, à sa souveraineté ou à la sécurité de sa population. Prenons la start-up XYZ qui s’illustre dans une technologie avancée (spatiale, quantique, cybersécurité, biotechnologie…). Elle cherche aujourd’hui plus de 100M€. Plusieurs fonds non Européens l’approchent avec au-delà du financement, des velléités de récupération de la technologie. Sous couvert d’un financement, il s’agit en fait d’un acte de prédation économique, souvent caractérisé après coup.

Dans un autre registre, on assiste depuis la fin des années 90 à une prolifération de lois à portée extraterritoriale, notamment d’origine américaine. La procédure « Discovery » offre à toute partie à une action en justice portée devant un tribunal non-américain la possibilité d’obtenir, du juge américain, la production forcée d’éléments de preuves détenues par toute partie se trouvant sur le territoire américain, à condition que les éléments de preuve en question soient destinés à être utilisés pour les besoins de la procédure étrangère. Il n’en faut pas plus pour servir de levier d’intelligence économique en demandant la production de toute ou partie de documents ou informations protégés normalement par le secret des affaires. Devenu un instrument de la politique étrangère américaine, cet abus de lois à portée extraterritoriale a pris de l’ampleur après 2001. Sur les 26 entreprises condamnées : 14 entreprise européennes et 5 françaises. Aucune société chinoise ou russe n’a fait l’objet de condamnation.

Un constructeur automobile français qui vendait près de 450 000 véhicules en Iran cède à l’injonction de l’administration Trump qui menace de représailles les entreprises étrangères faisant affaire avec Téhéran ; à savoir des sanctions pécuniaires et une éviction du marché américain.

On comprend dès lors l’émergence du concept de souveraineté industrielle et technologique. Proche de la sécurité économique, il se définit comme la matérialisation d’une politique d’État visant à protéger et à promouvoir les intérêts stratégiques d’une nation. Employé très largement, voire trop depuis le début de la démondialisation, il regroupe les activités de protection du patrimoine, de délimitation des périmètres industriels et technologiques critiques et de lutte contre les activités de renseignement économique étrangères. C’est toute la difficulté liée au sujet de la souveraineté. Où s’arrête les pratiques de libre concurrence et quel moment commence l’acte prédation économique nécessitant d’agir ? Pour l’heure, cela reste une question d’interprétation nationale et d’état d’esprit régalien au moment où la situation se présente.  Plus le sentiment national est fort ou l’interdépendance à d’autres pays élevée, plus la volonté d’intervention d’un pays sera aigue, pour décourager a priori ou pour bloquer a posteriori. Sans définition commune en Europe, et sans doctrines d’intervention nationale réellement publiques, le cadre de l’action donné aux acteurs économique reste incertain, générant un risque pour celui qui veut agir sans froisser, se déployer sereinement. Une incertitude de plus à l’heure où l’on parle de démondialisation.

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