Vendre toujours plus, chaque jour, chaque année se baser sur l’historique pour fixer des objectifs, mettre tout le monde sur les rails pour les atteindre, voire les dépasser. La recherche de la rentabilité et de la performance passe obligatoirement par la direction commerciale. Impactant toutes les fonctions de l’entreprise, l’intelligence économique n’échappe pas au service commercial. Certaines entreprises la pratique intensément, d’autres en font partiellement, parfois même sans le savoir. Tour d’horizon sur l’impact de l’intelligence économique sur les ventes et la performance commerciale d’une entreprise.
Si d’un point de vue commercial, l’intelligence économique consiste à bien se préparer pour mieux affronter la concurrence et se développer commercialement parlant, alors les points suivants sont prépondérants pour remporter la bataille commerciale, et par conséquent développer l’entreprise.
Le terrain de jeu (ou champ de bataille).
Condition « sine qua non » pour gagner la bataille commerciale, il faut d’abord un lieu. Régional, national ou international, selon la taille de l’entreprise, son champ d’action, ainsi que la localisation de ses concurrents. Connaître parfaitement le terrain sur lequel on livre le combat est fondamental (L’importance du terrain par Sun Tzu). Depuis quelques années, le terrain de jeu est mondial, et le nombre d’adversaires ne cesse d’augmenter, ce qui complique assez souvent la donne. De la même manière, les frontières du « commerce physique » et du « virtuel » sont tombées, faisant place à un monde « phygital », où les « pure-players » affrontent sans complexes les traditionnels professionnels du commerce physique, et vice versa. Le terrain étant par définition changeant, il convient donc d’être en capacité de s’adapter pour avoir une meilleure position sur son marché.
La veille concurrentielle.
Elle consiste à identifier les menaces des concurrents, des nouveaux entrants, mais aussi et surtout les opportunités qui émanent du terrain : politique tarifaire agressive, nouveautés, nouveaux entrants, communication, changement de positionnement, évolutions des besoins clients, innovations technologiques… Surveiller et défendre, condition numéro un de la fonction commerciale, pour bâtir un développement structuré. Rien ne sert de conquérir des parts de marché d’un côté si on se fait attaquer et que l’on en perd d’un autre côté. En le réduisant trop souvent à une fonction de « vente » (« push »), de nombreuses entreprises sous-estiment le champ d’action opérationnel du service commercial qui doit alimenter en informations les services marketing, logistique, R&D, financier… sur les avancées des concurrents, leurs atouts, et leur façon de se comporter.
Aucune bataille n’a lieu sans adversaire. La connaissance (maître mot de l’intelligence économique) permet au niveau commercial de savoir qui sont ses adversaires : forces, nombre, profils, techniques utilisées, outils, performance, gouvernance, culture d’entreprise, image, couverture terrain, fréquence de passage, structure commerciale, positionnement tarifaire, nouveautés, conditions de ventes et après -vente, recrutement commercial…
Plus on connaît ses concurrents et plus on peut anticiper leurs actions. On peut également rapidement réagir en cas de mouvements de ces derniers. La force de vente joue un rôle prépondérant. Elle est le véritable premier rempart défensif de l’entreprise en défendant les positions de l’entreprise sur son marché. Elle agit en tant que véritable « vigie » de l’’entreprise. Rien ne doit lui échapper, et la direction générale doit d’une part sensibiliser ses troupes à la veille commerciale, et d’autre part, mettre en place une organisation permettant la remontée d’informations structurée. Ainsi par exemple, connaitre les conditions de vente de son concurrent procure un avantage concurrentiel certain, que toute entreprise serait mettre à profit.
Enfin, il n’y pas un concurrent mais des concurrents ! De nationalités différentes, avec des objectifs différents, et surtout des moyens différents. La connaissance de ces éléments sont primordiaux pour définir sa stratégie commerciale et atteindre les objectifs.
La stratégie commerciale.
Dans l’entreprise comme sur un champ de bataille, il faut savoir à la fois défendre et attaquer. Un bon directeur général et un bon directeur commercial doivent préparer leurs arrières en identifiant des stratégies à mettre en place, et anticiper les stratégies mises en place par les concurrents. J’aime l’idée de comparer cela à la célèbre série « Games of Thrones ». Les protagonistes des familles concurrentes, retranchées dans leurs châteaux, sont prêts à tout pour atteindre le seul objectif : s’asseoir sur le trône de fer ! Attaquer ne suffit pas, encore faut-il être capable de défendre ses positions. Aucun ne se risque à perdre son château, attendant la moindre opportunité, par contre, pour gagner du terrain et se rapprocher de l’objectif. Une excellente connaissance de sa force de vente permet d’anticiper et de construire une stratégie en fonction des qualités de ses équipes sur le terrain.
Le recrutement de la force de vente.
Constituer la meilleure équipe permet de mettre toutes les chances de son côté pour gagner des parts de marché. Identifier quelle équipe il faut permet de mieux prospecter, signer plus de contrats et fidéliser ses clients. Adapter l’équipe selon les missions, les objectifs, la culture d’entreprise, et le terrain sur lequel elle va évoluer est nécessaire. In fine, c’est en général l’équipe la meilleure et la mieux préparée qui gagne. Le recrutement est donc une phase importante et il est souvent à l’image de l’entreprise, ou du moins il est révélateur de l’importance que la gouvernance lui consacre. Un élément fort intéressant à analyser sur le terrain, pour prendre à revers ses concurrents sur un volet purement commercial, et faire la différence par la compétence chez les clients.
Les clauses contractuelles.
Un commercial, et encore plus un directeur commercial, détient de nombreuses informations sur l’entreprise et sur les clients. Il est coutume d’entendre se plaindre une entreprise à propos de son commercial qui est parti à la concurrence, avec le fichier client, ou avec le plus gros client. Mettre de l’intelligence économique dans le service commercial, c’est d’abord comprendre que le fichier client constitue un élément du capital immatériel de l’entreprise. Que la perte du plus gros client va engendrer une chute du C.A et que le départ du commercial va déstabiliser l’entreprise qui va devoir recruter, former… et perdre un temps certain, avant de récupérer son précédent niveau de rentabilité.
Trop d’entreprises sous-estiment le rôle d’un commercial, qui d’un point de vue intelligence économique est une opportunité mais également un risque. Un commercial connaît beaucoup de choses : la culture de l’entreprise, les personnes détenant des compétences clés, le niveau de formation, les objectifs commerciaux sur les prochaines années, les marges, la stratégie commerciale, les nouveautés, les projets marketings (innovations), les plans marketing et communication relatifs à ces produits ou services actuels et futurs, la relation avec les clients, la politique de rémunération, les accès informatiques, les protocoles internes, les codes d’accès aux bâtiments… Autant de précieux éléments qui peuvent servir un concurrent, s’il était appelé à quitter le navire.
Le règlement intérieur, les clauses de non concurrence et de confidentialité ont certes leurs limites, mais elles ont l’avantage de donner un cadre, et de prévenir le salarié des risques et sanctions en cas de vol d’informations appartenant à l’entreprise. Car bien souvent, le salarié commet cette erreur faute de connaissance sur ce sujet précis. Cela n’est pas tout le temps du vol volontaire de données dans le but de déstabiliser l’entreprise. Le service RH a donc toute latitude pour contractuellement mettre toutes les clauses nécessaires selon le profil de poste du salarié, mais également et surtout le sensibiliser afin de minimiser les risques de fuites.
Les salons professionnels.
En matière de terrain… le salon est un terrain de chasse exceptionnel ! La présence d’une entreprise sur un salon est en général un moment fort. Développement des ventes, recueil de prospects qualifiés, action de communication, action marketing, veille concurrentielle… la réussite d’un salon se prépare. Les concurrents vont sûrement venir chercher de l’information, et il faut à la fois se préparer sur le plan défensif et offensif, de manière légale. Les techniques illégales sont nombreuses et connues pour soutirer de l’information à un concurrent sur un salon. Les connaître permet de se protéger et de gagner en compétitivité, marge, part de marché, pour ainsi conserver son avance sur les concurrents.
Le débauchage de compétences clés.
Un commercial n’est pas une compétence clé, sauf si c’est le meilleur de la boîte. Un directeur commercial en revanche en est une. En relation avec la direction générale de l’entreprise, il a accès à un niveau d’information stratégique plus important que le commercial terrain. En charge d’élaborer la stratégie commerciale, c’est le commandant de ses troupes sur le terrain. En général quand il part, en plus d’avoir des informations importantes sur l’entreprise (stratégie commerciale à court-moyen-long terme, santé financière, innovation en cours, recrutements…), ayant connaissance des pièces maîtresses au sein de son équipe de vente, il peut emmener avec lui les meilleurs éléments, portant un coup fatal économique important à l’entreprise. Le turn-over des équipes de vente est souvent symptomatique d’une culture d’entreprise et d’une politique de rémunération peu valorisante. En bout de chaîne, c’est la qualité de la relation commerciale qui en pâtit, la confiance qu’il faut renouer, et cela peut envoyer de mauvais signaux aux partenaires et clients.
Les déplacements professionnels
Hôtel, avion, train… Par définition, le commercial est sur le terrain, au plus proche de ses clients et prospects. Pour cela, il est donc amené à prendre les transports en commun et souvent travailler pour optimiser son temps. En général pas sensibilisé au fait de protéger les informations sur lesquelles il travaille, ou parfois peu soucieux des directives en ce sens données par l’entreprise, le commercial ne protège pas ces informations. A la vue de tous, il rédige des mails, travaille sur des appels d’offres, prépare des Powerpoints, des réunions, fait des synthèses, des prévisions de ventes. Quantité indénombrable d’informations (stratégiques) sont ainsi dérobées chaque année, à cause de la non prise de conscience ou de la non application de règles de sûreté mises en place par les entreprises conscientes de ces risques. A quoi cela sert-il de bien recruter, former et d’investir en R&D et marketing, si c’est pour se faire voler un savoir-faire, une technologie, ou un prix sur un appel d’offres ?
Atteindre des objectifs pour faire croître l’entreprise, c’est l’évidence même. Se donner les moyens d’y arriver est primordial. L’intelligence économique, de par sa transversalité dans l’entreprise, permet commercialement de performer par rapport à ses concurrents, de dégager de la marge, et de gagner des parts de marché. Par contre, il faut avoir conscience que les concurrents ont les mêmes objectifs que vous ! Les gains en parts de marché sont tellement faibles aujourd’hui, que le monde des affaires regorge de pièges et tentatives de déstabilisations de la part de concurrents parfois sans scrupules, et utilisant des moyens illégaux pour gagner des clients.
Les entreprises qui vont gagner sur le plan commercial sont celles qui vont comprendre et utiliser toutes les possibilités de la fonction commerciale dans l’entreprise : surveiller, identifier, défendre et attaquer. Dans un monde de plus en plus complexe et rapide, la mise en place de l’intelligence économique dans l‘entreprise est véritablement une source de profit et de pérennité pour l’entreprise.
Sources :
Sun Tzu France : « De l’étude du terrain. »
Zone Subversive : « Game of Thrones : série et stratégie politique »
E-marketing.fr : « Phygital »
JDN : « Pure Player »
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