Alors que Rogue One sort mercredi en France et vendredi aux États-Unis, le film devrait réaliser un box-office phénoménal dans le monde, mais aussi conclure pour Disney une année 2016 riche en succès, et en diversité.
Des acquisitions réussies depuis 10 ans
Une histoire au sein de Disney devenue légendaire raconte que Robert (Bob) Iger, tout juste nommé CEO à la place de Michael Eisner en 2005, est à DisneyWorld pour la traditionnelle parade du parc ; ce jour-là, à sa grande surprise, deux-tiers des personnages qui défilent dans cette parade sont soit des personnages Pixar, soit des personnages de dessins animés créés voilà plus de 50 ans. Bob Iger se dit que Disney n’a pas renouvelé son IP (intellectual property) de manière assez forte, et surtout que Pixar est un allié indispensable. Steve Jobs, le patron de Pixar en plus de celui d’Apple, à l’époque était en froid avec Michael Eisner et refusait de lui parler ; pire même, il envisageait d’arrêter de travailler avec Disney et souhaitait faire distribuer les dessins animés Pixar par un autre studio. Cette situation était loin d’enchanter Bob Iger, qui se dit que s’il perdait les droits de distribution de Pixar, il perdrait une manne incroyable pour ses parcs, son merchandising, etc.
Quelques semaines plus tard, il décidait de racheter Pixar pour plus de 7 milliards de dollars, rendant Steve Jobs milliardaire, et faisant de ce dernier l’actionnaire principal de Disney.
Cette histoire illustre la force de Disney : la société, sous Bob Iger, était devenue consciente de sa force (être capable de rendre un personnage reconnu dans le monde entier, grâce au marketing, aux parcs, au merchandising, aux chaînes de télé du groupe ABC), mais aussi de son besoin d’aller chercher ces mêmes personnages, cette IP, ailleurs si nécessaire.
Ainsi, Disney ne se contente pas d’avoir acheté Pixar qui enchaîne les succès critiques et commerciaux. Disney rachète ensuite Marvel en 2012 pour plus de 4 milliards de dollars et assoit, grâce au propriétaire de Spider-Man ou Iron Man, sa suprématie auprès des petits garçons. En effet, Disney avait déjà le monopole des petites filles avec les Princesses Disney, mais manquait à sa panoplie une IP pour garçons. Chose faite avec Marvel !
Marvel enchaînait déjà les films à succès, alors distribué par Paramount. Mais avec une « bibliothèque » d’IP de plus de 4 000 personnages qui permettrait à Disney de peupler ses parcs et de créer des beaux jouets, Disney prenait une toute nouvelle taille. Et ce n’était pas fini !
Car, enfin, en 2012 Disney rachetait LucasFilm pour plus de 4 milliards de dollars, remplissant aussi les poches de Georges Lucas, mais acquérant non seulement la propriété de Luke Skywalker et Darth Vader, mais aussi d’Indiana Jones, par la même occasion.
Une année 2016 qui bat tous les records
Disney dispose donc maintenant de quatre piliers majeurs : Pixar, Marvel, LucasFilm, et Disney Animation (créateurs de Moana/Vaiana, Frozen/La Reine des Neiges, etc.). En effet, même si ces trois premiers piliers n’ont pas été créés de l’intérieur, Disney utilise la créativité de Pixar pour inspirer des dessins animés Disney qui rentrent dans le « zeitgeist » ou la pop culture. Et non-content de créer des dessins animés qui renouvellent le genre et changent enfin leur vision de la « princesse sans défense », Disney a découvert un nouveau filon en adaptant en film ses dessins animés classiques des années 50-60 tels qu’Alice au Pays des Merveilles, Cendrillon, Le Livre de la Jungle, en 2017 La Belle et la Bête.
En 2016, Disney a fait preuve d’une telle suprématie que même les autres studios n’arrivent pas à rivaliser avec eux. Ainsi, d’autres studios ont tenté de faire leur propre version en film de Peter Pan, ou de Blanche Neige, mais ces films ont été des échecs commerciaux. Rien qu’à regarder les 45 milliards de dollars de merchandising qu’engrangent les studios Disney chaque année, le deuxième studio le plus gros après Disney est Time Warner avec tout juste 6 milliards de dollars de merchandising.
Cette année aura vu Disney placer dans le top 5 des succès cinématographiques mondiaux 4 films ! Captain America: Civil War avec plus de $1,1 milliards; Le Monde de Dory/Finding Dory, avec plus de $1,03 millards ; Zootopia tout juste derrière, avec $1,02 ; Le Livre de la Jungle / The Jungle Book avec $966.6. Seul Universal, avec son dessin animé The Secret Life of Pets clôt le Top 5 avec plus $875 million de dollars.
Et donc, avec la sortie imminente de Rogue One, même si le box-office du film n’atteindra pas les plus de 2 milliards de dollars pour l’Épisode VII, le succès sera sans doute au rendez-vous avec plus d’un milliard de dollars attendus de recette dans le monde.
Disney est prêt à établir un nouveau record à Hollywood en box-office annuel en dépassant les 6,89 milliards de dollars qu’avait réalisé Universal 2015. Avec plus de 23,7% de part de marché aux Etats-Unis sur le box-office 2016, il s’agit de la plus belle part d’un studio depuis au moins 15 ans.
Une diversité de plus en plus grandissante
Mais la meilleure nouvelle est sans doute que ce succès ne se fait pas aux dépens de la diversité. Pauline De Breteuil déclarait un jour que le personnage qu’elle haïssait le plus « était la Belle au Bois Dormant : c’est une femme qui passe une bonne partie de son histoire à dormir, et lorsqu’un prince qu’elle découvre à peine la réveille en l’embrassant, elle l’épouse immédiatement ». C’est effectivement un modèle plutôt terrible pour les femmes, mais qui a été immortalisé dans un dessin animé de Disney de 1959.
Mais à regarder le profil de princesse de la Reine des Neiges (deux sœurs qui ne se contentent pas de chercher l’amour vide, mais préfèrent combattre la malédiction familiale), ou Moana, qui met en scène une jeune princesse des îles polynésiennes, une première depuis La Princesse et la Grenouille depuis 2009.
Moana raconte l’histoire d’une princesse déterminée, débrouillarde, et vraiment loin des canons Disney des années 50. Bien que le studio ait longtemps mis les femmes au centre de ses dessins animés, et ce, depuis Blanche Neige en 1937, Disney a rencontré un succès phénoménal avec sa ligne de « Princesses » en produits dérivés grâce à des femmes beaucoup moins affirmées et indépendantes que ces dernières années. Les premières héroïnes Disney attendaient que leur prince vienne les sauver, et c’était tout ! Ce qui les définissait n’était pas leur personnalité ou leur courage, c’était leur royauté et leur patience. Moana, elle décide d’entreprendre un voyage dangereux par-delà les océans non pas pour trouver l’amour, mais pour sauver son île. En général, ce genre de voyage initiatique était réservé aux hommes chez Disney !
Mais au-delà du dernier dessin animé, Disney a mis au centre de Star Wars des femmes ou des personnages issus de la diversité ! En effet, Rey et Finn dans l’Episode VII (et au-delà) sont bien plus affirmés que les personnages de la trilogie originale, mais Rogue One met aussi une femme au centre. Et Zootopia et Brave sont d’autres exemples récents à mettre des personnages féminins au centre de l’histoire, qui sont déterminés, émancipées et égales voire plus débrouillardes que les personnages masculins. On est très loin de la Belle au Bois Dormant !
Lorsque Rogue One aura une nouvelle fois affirmé la suprématie de Disney sur le cinéma mondial en 2016, on pourra au moins les remercier d’avoir utilisé leur domination pour mettre au centre de la pop culture des personnages plus ouverts, plus diverses, et plus représentatifs du monde autour de nous.
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