Dans le monde des cryptomonnaies, il suffit de quelques heures pour créer des fortunes de milliards de dollars. La vitesse est donc le maître mot et CZ est le plus rapide de tous. Après un bref passage dans les minuscules bureaux de Tokyo, « Je pouvais toucher quatre personnes juste en tournant sur moi-même », le codeur sino-canadien de 41 ans dirige désormais Binance, une plateforme d’échange de cryptomonnaies qui est devenue la plus grande du monde en seulement 180 jours. Changpeng Zhao, dit CZ, a fait ses armes en programmant des système d’échange de haute fréquence pour les flash boys de Wall Street avant de fonder Binance.
Sa plateforme traite 1,4 millions de transactions par seconde. Lors d’un pic de transactions en janvier, son système a traité jusqu’à 3,5 milliards de nouveaux ordres, d’annulations et d’échanges. Les spéculateurs, dont 25 % sont américains, échangent 120 cryptomonnaies différentes sur Binance. Au dernier trimestre de 2017, la plateforme de CZ a généré un bénéfice de 163 millions d’euros (200 millions de dollars). BNB, la monnaie virtuelle créée par CZ en août dernier, offre une réduction de 50 % sur les frais de transaction et bénéficie d’une capitalisation boursière d’un milliard d’euros (1,3 milliards de dollars). Ses parts dans Binance et sa cryptomonnaie font s’élever la fortune personnelle de CZ à 1,63 milliards d’euros (2 milliards de dollars).
Mais il n’est pas le seul dans ce cas. Chris Larsen, qui a longtemps été un dirigeant connu pour avoir créé des applications pour la fintech, a vu sa valeur nette flirter avec les 16,3 milliards d’euros (20 milliards de dollars) lors de l’apogée des cryptomonnaies début janvier, grâce à ses 5,2 milliards de XRP, le token de Ripple, l’entreprise qu’il a fondée. XRP a depuis perdu 65 % de sa valeur, mais Chris Larsen est tout de même à la tête de la liste Forbes des 20 plus grosses « cryptofortunes ».
Il existe désormais près de 1 500 cryptomonnaies différentes, pour une valeur totale de 447 milliards d’euros (550 milliards de dollars), soit 31 fois plus qu’au début de l’année 2017. Alors que les prix des différentes cryptomonnaies continuent de faire des montagnes russes, le Bitcoin a perdu plus de 50 % de sa valeur depuis son pic de décembre. Il est évident que les cryptomonnaies basées sur la blockchain vont perdurer. Ces actifs virtuels ont une réelle valeur, bien que volatile et spéculative. La demande est en partie alimentée par le marché noir, l’évasion fiscale de certains particuliers et les pays évitant les sanctions comme la Corée du Nord. Mais elle est surtout entretenue par l’engouement général pour cette technologie et le désir d’une monnaie indépendante des Etats nations.
Les gagnants de cette loterie digitale sont différents de ceux des frénésies précédentes. Les débuts confus, voire anarchiques, utopiques ou libertaires ont attiré un large éventail de pionniers allant des cyberpunk anti establishment aux financiers de la Silicon Valley, en passant par des milliers d’investisseurs lambda. Comme pour toute ruée vers l’or, vendre les tamis et les pioches ou, dans ce cas, gérer les plateformes d’échanges, s’avère plus juteux que spéculer. Et, bien sûr, l’argent facile attire les arnaqueurs et les voleurs.
En janvier, l’héritier de la finance, Matthew Mellon, dont l’investissement de 1,63 millions d’euros (2 millions de dollars) dans le XPR a bourgeonné pour atteindre 800 millions d’euros (1 milliards de dollars), a été victime de ce phénomène. Le lendemain du coup du siècle, l’homme de 54 ans déclare avoir repéré quatre personnes roder autour de sa maison de Los Angeles. Les intrus en voulaient certainement à ses XRP car ils ont volé quatre ordinateurs portables et deux smartphones mais ils n’ont pas eu la « cryptofortune » de Matthew Mellon. Toutes les fortunes de notre liste savent comment protéger leurs actifs. Dans ce cas précis, les clés sont divisées et réparties soigneusement sur tout le territoire américain et enregistrées sous d’autres noms que le sien. Mais cet incident montre bien que la « cryptomanie » est différente des bulles financières précédentes.
Il n’est pas facile d’identifier la plus grosse fortune et de l’estimer. Les monnaies virtuelles ne sont pas encadrées par le système financier mondial et elles évoluent dans un milieu étrange, un mélange de paranoïa et d’exposition ostentatoire. Prenons l’exemple de Binance, l’échange de CZ. Il ne dispose pas de réel siège social, ses employés sont dispersés dans différents pays et CZ semble lui-même changer de bureau comme de chemise. « Nous ne pouvons pas encore nous installer à un endroit précis à cause des réglementations qui risquent de voir le jour », explique CZ. Aux dernières nouvelles, il est à Taïwan.
CZ représente bien le « cryptomilliardaire » moyen. De son côté, l’ancien acteur Brock Pierce s’habille comme Jack Sparrow et vit dans un penthouse à Santa Monica en Californie. « Avec les cryptomonnaies, c’est l’occasion de devenir extrêmement riche, de devenir quelqu’un qui peut réellement avoir un impact sur la planète ». Brock Pierce a déjà réussi à récolter 49 millions d’euros (60 millions de dollars) chez Goldman Sachs, avec l’aide de Stephen Bannon, ancien conseiller stratégique de Donald Trump à la Maison Blanche, afin de créer une entreprise commercialisant des épées, des cottes de maille et des chevaux virtuels pour des jeux vidéos en ligne. Il a déjà fait parler de lui dans les années 90 à cause d’une affaire d’abus sexuels sur mineurs. Il a toujours nié les accusations et n’a jamais été jugé coupable, il a cependant reconnu avoir transporté des mineurs en dehors de l’état à des fins sexuelles.
Brock Pierce est un pionnier dans le domaine des cryptomonnaies. Il a commencé en minant du Bitcoin puis en finançant des start-up de blockchain et en investissant dans des dizaines d’ICO. Bien qu’il ait publiquement déclaré avoir légué des milliards de dollars à des œuvres caritatives, il refuse d’apporter la preuve qu’il a déjà détenu autant d’argent.
Étant donné le manque de transparence du milieu et son hypervolatilité, nous présentons nos estimations de valeur nette sous forme de fourchette. Nous avons basé nos calculs sur les parts de cryptomonnaies (certains ont donné des preuves), les bénéfices de l’échange de cryptoactifs après imposition et les parts dans des entreprises liées aux cryptomonnaies. Nous avons également classé les fortunes en cinq catégories : les idéalistes, les constructeurs, les opportunistes, les dirigeants d’infrastructures et les investisseurs. Beaucoup se classent dans plusieurs catégories.
Nous sommes presque sûrs d’avoir oublié des fortunes et que certaines estimations sont loin du compte. Mais c’était déjà le cas en 1982, lors du premier classement de Forbes regroupant les 400 plus grosse fortunes des États-Unis. À l’époque, on nous avait déconseillé de le publier, en vain. Nous pensons sincèrement que c’était une bonne chose que de mettre en lumière ces fortunes invisibles. Tout comme les cryptomonnaies, de telles fortunes ne devraient pas rester dans l’ombre.
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