La maison de luxe française Chanel a fait état de sa volonté de bannir de ses collections les « peaux exotiques », expliquant que les filières d’approvisionnement en la matière ne répondaient pas à ses exigences d’éthique et de traçabilité.
Une première dans l’univers feutré du luxe. Si, cet été, Burberry a fait état de sa volonté de bannir les fourrures de ses collections, aucune maison de luxe prestigieuse n’étaient, en revanche, allée jusqu’à renoncer aux « peaux exotiques » (crocodile, lézard, serpent, galuchat). Jusqu’à aujourd’hui. Et ce « pionnier » se nomme Chanel. En effet, la griffe a annoncé écarter lesdits « matériaux » de ses collections car ceux-ci ne remplissaient pas ses critères en matière d’éthique et de traçabilité. « Il est de plus en plus difficile de se procurer des peaux exotiques correspondant à nos exigences en matière éthique », souligne la maison de couture française dans un communiqué. Dès lors, de quelle marge de manœuvre dispose la marque pour remplacer ces produits n’ayant plus droit de cité et qui, rappelons-le, sont parfois deux à trois fois plus chers que ceux des sacs en cuir de veau ? Chanel, droite dans ses bottes, répond que la transition sera assurée par « une nouvelle génération de produits ultra luxe s’appuyant sur la créativité, les matières nobles et innovantes ainsi que sur des finitions exceptionnelles ». Fin de citation.
Un positionnement en parfaite adéquation avec les aspirations des « Millennials », cette nouvelle génération de clients ô combien choyée par les mastodontes du luxe et particulièrement sensible aux questions environnementales et de bien-être animal. En outre, le secteur est mis sous surveillance par des organisations non gouvernementales comme la très active et médiatique association de défense des animaux People of the Ethical Treatment of Animals (Peta). L’épisode le plus révélateur à ce sujet remonte à 2015, année durant laquelle la chanteuse Jane Birkin avait sommé Hermès de débaptiser l’emblématique sac qui porte son nom pour protester contre les pratiques d’abattage dans une ferme de crocodiles dénoncées par cette association. Les deux parties avaient finalement réglé leur différend après qu’Hermès eut reconnu un « dysfonctionnement ponctuel » dans une ferme au Texas.
Chanel, le pionnier
Mais au-delà de ces considérations, rappelées par Reuters, la décision radicale de Chanel va enjoindre la concurrence à rapidement se positionner sur la question de l’utilisation de peaux exotiques. « Ce virage fera réfléchir d’autres groupes, alors même que la plupart des grands opérateurs du luxe ont d’ores et déjà abandonné l’usage de la fourrure en PAP (Gucci encore récemment) », abonde Invest Securities cité par le magazine Capital. Pour autant, il est loin d’être acquis que cette « nouvelle donne » soit au goût de certains clients de Chanel, notamment du côté de l’Asie, férus de ces pièces en cuir exotique. « S’il existe naturellement des peaux et cuirs de très grande qualité de nature à déployer une offre ultra luxe en contrepartie, pas sûr dans l’immédiat que la clientèle asiatique s’associe à ces alternatives vu l’attrait qu’exercent pour cette clientèle les sacs en python ou autre crocos », développe le bureau d’études.
Et de poursuivre. « Or, les produits très sophistiqués qui sont derrière l’utilisation de ces peaux participent à un savoir-faire appréciable pour l’image d’une griffe donnée, et la rentabilité qui en est issue est probablement hors normes », conclut Invest Securities. Quid de la politique des autres « grands » en matière de bien-être animal ? A tout seigneur, tout honneur, c’est Stella McCartney qui fut la première à bannir de ses collections la « vraie fourrure », à savoir lapin, renard, vison et raton laveur asiatique. Du côté d’une maison comme Hermès, aucune décision n’a été prise en la matière, le groupe rappelant néanmoins que la fourrure « était très marginale dans ses collections ». Enfin, LVMH « s’engage à n’utiliser que des espèces dont la conservation n’est pas menacée, à respecter la CITES (la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction) et à soutenir et encourager les efforts de conservation de ses fournisseurs ». Le sac à main emblématique de Louis Vuitton, le fameux « Twist » est d’ailleurs confectionné à partir de la partie ventrale du crocodile. La maison Chanel fera-t-elle des émules ? L’avenir nous le dira.
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