En août dernier, lorsque Cosette Rinad découvre le décret de Donald Trump interdisant TikTok sur le sol américain, elle n’y croit pas. Utilisatrice de l’application depuis 2018, avec 2,3 millions de followers au compteur qui visionnent ses vidéos de lifestyle, elle avait même depuis peu engagé un agent de CAA, l’une des principales agences de talents d’Hollywood, pour faire avancer sa carrière. À cette annonce, la perspective de la fin de TikTok l’inquiète.
Dans les semaines qui suivent, l’échéance devient de plus en plus réelle : le président semble bien décidé à anéantir TikTok sur le sol américain. Cosette Rinad décide donc d’agir. L’étudiante de 21 ans déclare alors : « Laissez-moi trouver comment je peux m’investir dans tout ça et le contester, parce que ça commence à devenir de plus en plus réel ».
Son pari porte ses fruits vendredi dernier, lorsque la juge Wendy Beetlestone de la Cour de district des États-Unis déclare que le département du Commerce n’a pas le droit d’exécuter le décret de Donald Trump visant à mettre fin aux activités de TikTok aux États-Unis. Cette décision est le résultat d’un procès intenté par Cosette Rinab et deux autres stars de TikTok, qui ont lentement mais sûrement porté leur projet dans les tribunaux au cours des six dernières semaines, apportant une victoire cruciale à l’application.
Vanessa Pappas, directrice intérimaire de TikTok, a depuis déclaré dans un communiqué : « Nous sommes profondément émus par l’effusion de soutien de nos créateurs. Nous soutenons notre communauté qui partage sa voix, et nous nous engageons à leur offrir un endroit pour qu’ils puissent le faire ».
TikTok essayait jusqu’alors de mettre en place un accord pour satisfaire la demande du gouvernement Trump, qui souhaitait que l’entreprise chinoise soit vendue à une entreprise américaine. Après une procédure judiciaire frénétique, Oracle et Walmart se sont affichés comme les principaux prétendants au rachat, mais TikTok essaie toujours de déterminer les termes de la transaction, et son avenir est remis en question.
Entre temps, l’application a dû affronter directement les avocats du gouvernement américain. En septembre, TikTok obtient une décision du tribunal fédéral pour mettre un terme à l’arrêt des téléchargements, mais même après cela, l’échéance du 12 novembre plane toujours au-dessus de la plateforme, qui devait à cette date cesser ses activités aux États-Unis. C’était sans compter sur la détermination de Cosette Rinad, qui a permis de lever cette date limite. La jeune femme a été rejointe dans son combat par Douglas Marland et Alec Chambers, deux personnalités très suivies sur TikTok, l’un pour ses vidéos comiques, l’autre pour ses créations musicales.
Jusqu’à présent, la plupart des regards étaient tournés vers une autre affaire juridique : un procès intenté par TikTok même, contestant la date limite du 12 novembre fixée par Donald Trump, qui devait être entendu mercredi par le même juge fédéral qui a mis fin à l’interdiction des téléchargements. Depuis le revirement de situation, il n’est pas certain que cette affaire soit entendue. TikTok n’a pas souhaité faire de commentaires.
Si la décision de vendredi a pris beaucoup de monde par surprise, ce n’a sans doute pas été le cas pour TikTok. Selon Cosette Rinab, cet été, la plateforme s’est tournée vers certains créateurs, les encourageant à envisager une action en justice contre la décision de Donald Trump. Ici, TikTok semble avoir poursuivi une stratégie juridique astucieuse : non seulement elle poursuivrait le litige pour mettre fin aux actions du président, mais elle ferait aussi pression sur ses utilisateurs pour qu’ils fassent de même, ouvrant ainsi de multiples voies d’attaque contre le gouvernement fédéral, ce qui augmenterait ses chances de victoire. TikTok n’a pas voulu faire de commentaires sur le nombre d’utilisateurs ayant intenté des procès similaires à celui de Cosette Rinab.
La jeune femme avait rencontré Douglas Marland et Alec Chambers lors d’événements passés, comme VidCon, un regroupement annuel des influenceurs du sud de la Californie. Les trois créateurs de contenu se connaissaient donc un peu, et se sentaient suffisamment à l’aise pour unir leurs forces.
Dans une plainte déposée devant la cour fédérale en septembre, Cosette Rinab et ses collègues ont fait valoir que l’interdiction allait à l’encontre de leurs droits à la liberté d’expression, garantis par le premier amendement, et menaçait de leur retirer leur gagne-pain. Tous trois avaient déjà obtenu des parrainages de marque dans le passé, la voie la plus lucrative pour les créateurs de gagner de l’argent sur TikTok. Cosette Rinab explique : « Cela mettrait non seulement au chômage un grand nombre de personnes qui dépendent de TikTok pour leurs revenus, mais cela empêchait aussi de nombreuses autres de communiquer par le biais de l’application ».
Cosette Rinab est née à New York, où elle a grandi et a fréquenté le lycée artistique LaGuardia High School de Manhattan. À l’université de Californie du Sud, elle étudie les relations publiques et le cinéma, des études qui lui ont permis de se faire une place sur les réseaux sociaux. L’un de ses TikTok les plus populaires porte sur des produits d’Amazon étonnamment qualitatifs, qui selon ses propres mots, l’a conduite à adopter « une habitude d’achat très malsaine ». L’influenceuse réalise également des vidéos de tutoriels lifestyle, notamment sur la mode.
La jeune femme est parvenue à mener son action en justice en restant à distance des tribunaux, gardant le contact avec ses avocats et ses collègues « par le biais d’appels vidéo, d’appels téléphoniques ou de groupes de discussion par SMS, ce genre de choses ». La semaine dernière, Douglas Marland et elle ont répondu aux questions du gouvernement fédéral lors d’une audience virtuelle.
Si Cosette Rinab et ses collègues l’ont emporté vendredi dernier, TikTok n’est pas encore complètement sorti d’affaire. Le gouvernement américain peut certainement encore faire appel de la décision, une notion que la jeune femme estimerait être un mauvais classement des priorités gouvernementales.
Cosette Rinab conclut : « Les élections sont dans quelques jours seulement, et au milieu de tout cela, il semble que le plus grand problème du gouvernement ait été une application de réseaux sociaux. Le monde a besoin de plus de contenu de qualité comme celui fourni par TikTok. Et je pense qu’il est tout simplement fou que le gouvernement décide de consacrer son temps et ses ressources à cela ».
Article traduit de Forbes US – Auteur : Abram Brown
<<< À lire également : Élections Américaines : TikTok Limite La Diffusion Du Contenu Non Vérifié >>>
Vous avez aimé cet article ? Likez Forbes sur Facebook
Newsletter quotidienne Forbes
Recevez chaque matin l’essentiel de l’actualité business et entrepreneuriat.
Abonnez-vous au magazine papier
et découvrez chaque trimestre :
- Des dossiers et analyses exclusifs sur des stratégies d'entreprises
- Des témoignages et interviews de stars de l'entrepreneuriat
- Nos classements de femmes et hommes d'affaires
- Notre sélection lifestyle
- Et de nombreux autres contenus inédits