Carlos Ghosn, l’ancien patron de l’alliance Renault-Nissan, en cavale au Liban alors qu’il était assigné à résidence au Japon, a donné une conférence de presse mercredi 8 janvier pour défendre « sa vérité ».
On devait s’y attendre, Carlos Ghosn s’est vite retrouvé en top tendance sur Twitter suite à sa conférence de presse. Ce qu’on attendait moins, c’est la grossière faute d’orthographe qui a accompagné le mot-dièse : #carlosgoshn. Même au paroxysme du « blanchiment » de son honneur comme il l’a répété, une petite tache persiste.
Pendant plus d’une heure, face à un parterre de plus de 150 journalistes du monde entier, l’ex PDG de Renault-Nissan s’est défendu et a contre-attaqué. Alors qu’il a fui de façon rocambolesque la semaine dernière le Japon où il était accusé de malversation et d’abus de confiance, c’est la première fois depuis novembre 2018 que M. Ghosn s’est exprimé librement devant la presse. Malgré un mandat d’arrêt d’Interpol. Les autorités libanaises ont affirmé qu’elles ne poursuivraient pas Carlos Ghosn. L’ancien magnat les a remerciées, tout comme sa femme, sa famille, ses proches, et « les anonymes » qui lui ont témoigné son soutien.
« Fuir l’injustice »
Carlos Ghosn a d’abord refusé de livrer les détails de son exfiltration – les garde-t-il pour Netflix ? -, mais l’a présentée comme nécessaire : « Je ne me suis pas soustrait à la justice, j’ai fui l’injustice. »
M. Ghosn devait livrer sa vérité. La voici : les accusations de la justice japonaise sont infondées. Pire, elles consistent en un complot politico-financier. Selon lui, Nissan a décidé de le faire tomber face à la place grandissante que prenait Renault dans l’Alliance, et voyait d’un mauvais œil la fusion envisagée entre Renault, Nissan et Mitsubishi. Noms et documents à l’appui – ces documents devraient être transmis à la presse -, M. Ghosn a décrit une « collusion » entre les hauts dirigeants de Nissan, les procureurs en charge de l’enquête et des leaders politiques japonais. « Certains de mes amis japonais ont pensé que la seule manière de se débarrasser de Renault était de se débarrasser de moi, » a affirmé M. Ghosn.
Une collusion entre les procureurs, Nissan et l’Etat japonais ?
L’homme d’affaire en cavale a aussi mis en avant ses conditions de détention très strictes, son impossibilité de contacter sa femme lors de son incarcération, son isolement, et ses interrogatoires sans avocat. Pour le Franco-libanais, les procureurs japonais n’avaient qu’un but : lui extorquer des aveux en dépit de la recherche de la vérité.
La conférence de presse a pris des allures de soupape de décompression pour Carlos Ghosn privé de tribune publique depuis des mois. Assuré et relativement fringuant, voire très offensif, il a passé en revue toutes les accusations qui pèsent sur lui, de ses salaires prétendument dissimulés au flou qui persiste autour du financement de son fastueux anniversaire à Versailles en 2014. Derrière lui, M. Ghosn a fait défiler sur un diaporama les différents documents en sa possession qui constituent pour l’heure sa défense. Difficile de savoir si ces éléments suffiront à le protéger, face notamment à ceux que présentent nos confrères de Mediapart et mettant M. Ghosn en cause.
Pour compléter sa démonstration, M. Ghosn a enfilé ses habits d’ancien PDG, vantant ses excellents résultats quand il était à la tête de l’alliance, en décalage avec les piètres performances que connaissent aujourd’hui Renault et Nissan : « Depuis mon départ, la capitalisation de Nissan a perdu plus de 40 millions de dollars par jour, et celle de Renault plus de 20 millions d’euros par jour. Le but d’un dirigeant, je croyais que c’était de faire de la croissance, d’augmenter les profits, de soutenir les actionnaires… » Hélas pour M. Ghosn, les bons résultats économiques de sa firme joueront peu en sa faveur face à des juges. Qu’il se rassure : il est peu probable qu’il en recroise.
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