Le web 3.0, plus qu’un buzzword, représente l’émergence d’une nouvelle version d’internet décentralisant le pouvoir de l’information. Celui-ci ne serait plus détenu par un petit nombre d’entités, mais serait décentralisé et partagé entre l’ensemble des internautes. Cette transformation de leur écosystème est possible en partie grâce à la technologie de la blockchain.
Cette dernière est connue pour son rôle dans les échanges de cryptomonnaies ou de NFT*. Elle est cependant avant tout une technologie permettant de stocker et transmettre des informations. C’est, en somme, un registre numérique, public et transparent d’un ensemble d’échanges d’informations via des « blocs » d’informations qui ne sont pas modifiables. Ce registre assure transparence, rapidité, traçabilité, et sécurité renforcée pour les échanges qui l’utilisent.
Hors de son utilisation originelle, la blockchain a un rôle à jouer dans la transformation de la gestion de l’information et des données en entreprise. Dans le cadre des ressources humaines, elle agit comme un gage de sécurité et un facilitateur de la gestion du cycle de vie de l’employée, de son arrivée à son départ.
Certification des compétences et digital work ID
Les processus de recrutement peuvent parfois être fastidieux pour l’ensemble des parties. Les qualités intrinsèques de cette technologie permettent la création de digital work ID, ou passeports de travail numérique, pour certifier l’ensemble des informations du CV d’un candidat, ou au moins une partie.
L’EM Lyon ou l’université de Lille certifient chacune leurs diplômes via une blockchain : un QR code vient ainsi se glisser dans le CV de leurs étudiants et renvoie à un certificat d’authenticité en ligne.
L’utilisation de la blockchain peut aussi permettre de certifier des compétences acquises par les employés en interne. LVMH a récemment expérimenté avec l’usage des NFT « LVMH HR Data Ambassador Badge » pour garantir l’appartenance à la communauté des ambassadeurs digitaux RH du groupe.
Côté employeur, la blockchain vient accélérer le processus de background check. Les RH n’ont ainsi plus besoin de faire appel à un tiers pour vérifier les informations d’un candidat. Complétée avec l’utilisation du Machine-Learning, cela permet d’accélérer la phase de pré-sélection des candidatures pour la suite du processus de recrutement.
Côté candidat, la création des digital work ID enlève une charge administrative pour le background check en centralisant et authentifiant l’ensemble des informations. Celui-ci a aussi le contrôle sur les informations qu’il souhaite ou non partager avec l’employeur via l’ID.
Cybersécurité et lutte anti-fraude
Les ressources humaines, au cœur de l’entreprise, gèrent les informations confidentielles des employés et sont donc sujettes au risque de la cyber-attaque. Assurer la sécurisation et l’intégrité de ces informations contre une attaque ou les fraudes internes est donc primordial.
EDF, Engie, La poste et la Caisse des dépôts utilisent aujourd’hui la blockchain Archipels comme une couche supplémentaire de leurs coffres-forts numériques.
Digiposte ancre l’empreinte numérique des fiches de paies, et non pas les documents eux-mêmes, dans la blockchain Archipels. Cette empreinte sert de preuve d’authenticité du document via une double identification et peut être vérifiable à tout moment.
Paiements internationaux et cryptomonnaies
Pour les multinationales, la gestion des paies à l’international peut vite se révéler être un processus laborieux et faisant appel à de nombreuses intermédiaires. La blockchain accélère et réduit le coût des paiements internationaux en limitant le nombre d’intermédiaires et en dépassant les problèmes de taux de change et de régulations locales.
Des services tels que Bitwage permettent aujourd’hui de faciliter les paiements internationaux et de payer une partie des salaires en cryptomonnaies.
Le règlement des salaires via des méthodes alternatives, telles que les cryptomonnaies ou les portefeuilles électroniques, est aussi un moyen pour les entreprises d’attirer les jeunes talents les plus férus de nouvelles technologies. Les cryptomonnaies représentent un moyen non négligeable pour les entreprises d’être perçues comme innovantes et audacieuses, et donc d’améliorer leur marque employeur.
Les limites de la blockchain aujourd’hui
Si le potentiel disruptif de la blockchain dans les ressources humaines est indéniable, cette technologie peine encore à s’imposer. Tout comme l’IA, le manque de compréhension sur son fonctionnement agit comme une barrière à son adoption, et nécessite d’insuffler une culture plus digitale dans l’entreprise. Par ailleurs, le cadre légal encore peu défini freine les entreprises à adopter cette technologie plus largement.
Les limites actuelles sont frappantes dans le cas des smartcontracts, ou contrats intelligents. Ces contrats reposent sur des lignes de codes stockées dans une blockchain et ne sont donc pas modifiables. Si ceux-ci offrent la promesse d’une efficacité accrue dans les processus administratifs en RH, leurs limites juridiques et fonctionnelles rendent compliquées, voire impossibles, leurs mises en place pour remplacer les contrats de travail classiques.
Les réponses aux problématiques autour de la blockchain tendent à se définir au cours du temps. Etant encore une technologie émergente, celle-ci doit gagner en maturité avant de pouvoir être adoptée. D’ici là, les entreprises qui ont fait le pas pour leurs processus RH observent dès à présent des retours positifs sur la productivité du service, et ouvrent la marche pour les autres.
Article écrit en collaboration avec Marie-Victoire Gallier.
*Non-Fungible Token : jeton non fongible en français. Un objet non fongible est un objet unique qui n’est pas interchangeable. Par exemple, l’argent est fongible, on peut échanger des euros ou des cryptomonnaies, mais une œuvre d’art est non fongible, car unique.
Source : https://www.futura-sciences.com/tech/definitions/tech-non-fungible-token-19205/
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