Dans un monde normal, la prévision de la demande est un impératif. Dans un monde en pleine pandémie c’est une gageure. Surtout lorsque cette pandémie s’accompagne de dérèglements en cascade. La Covid-19 a en effet imposé des arrêts d’activité et provoqué des pénuries de main d’œuvre d’une ampleur inédite.
Dans les pays ayant adopté une stratégie « zéro Covid », un seul cas positif a longtemps suffi pour interrompre l’activité de sites industriels entiers. Comment oublier la mise à l’arrêt partiel du port chinois de Ningbo-Zhoushan, le troisième plus grand au monde, car un seul de ses employés avait été testé positif au variant Delta ? Cet enchevêtrement de tensions a même conduit des organisations professionnelles du transport du monde entier à alerter l’ONU sur le fait que les chaînes d’approvisionnement « commencent à céder ».
En période d’imprévisibilité systémique, les certitudes s’effondrent les unes après les autres, par définition. Y compris celles relatives au comportement des consommateurs. Durant les deux dernières années, celui-ci a changé. Le e-commerce a connu une croissance fulgurante – selon la FEVAD, sa part dans le commerce de détail est passée de 9,8% à 13,4% entre 2019 et 2021. Dans le même temps, la fréquentation des magasins a chuté. Comme l’expliquait récemment Emmanuel Le Roch, délégué général de Procos (Fédération pour la promotion du commerce spécialisé), « dans les grands pôles de commerce, les baisses de trafic atteignent 20% à 30% par rapport à 2019 ». La coexistence de ces deux canaux, dans des proportions inconnues jusqu’ici, crée un nouveau degré de complexité pour la planification de la supply chain.
La data, martingale des entreprises dans un contexte incertain ?
A l’évidence, depuis son introduction par le US Army War College dans les années 90, l’utilisation de l’acronyme VUCA (volatile, incertain, complexe et ambigu) a rarement été aussi justifiée. Et ce n’est que le début, car les turbulences sont loin d’être terminées aux vues des dernières actualités : tension sur le fret maritime suite à l’explosion de la demande occidentale et à la hausse des prix, risque de chute des valeurs technologiques américaines, émergence de nouveaux variants…
Le monde va continuer à changer de plus en plus, imposant aux organisations d’adapter en permanence leur supply chain grâce à une maîtrise des données provenant de leur écosystème. On parle de supply chain data-driven. La mise en place de l’analytique dans une entreprise doit se concentrer sur 4 domaines clés : une équipe préparée et motivée, l’intégration de l’analytique dans les processus métiers, des décisions automatisées et intelligentes, et une gestion centralisée des données.
Cela présuppose de définir, avec le concours de leur partenaire technologique, une feuille de route analytique qui s’adapte au degré de maturité des différents publics vis-à-vis de la data science. Elle consiste en trois étapes : démontrer la valeur ajoutée, mettre en œuvre et optimiser.
En termes d’outils cela peut aller d’un planning Excel, modifié uniquement en cas de crise, jusqu’à des dispositifs plus poussés impliquant des modèles de prévision fondés sur le Machine Learning. On déploiera des programmes de développement de compétences spécifique pour les futurs data scientists, les utilisateurs (end users et power users) et le management qui aura un rôle de mentorat essentiel. Il est recommandé de passer par la mise en place d’un Analytics Board qui suit et pilote l’apport de la valeur ajoutée de l’analytique.
De plus, l’entreprise ne doit pas perdre de vue que la priorité est d’optimiser l’interaction et l’alignement entre data scientists et métiers… Le travail en silo, même avec le meilleur produit, mène inévitablement à l’échec !
C’est pourquoi des changements devront impérativement avoir lieu au sein des entreprises pour exploiter au mieux le potentiel de la data. Par exemple, les notions de prévision étant historiquement l’apanage des équipes demand et supply planning, ces dernières vont de plus en plus se mettre au service des équipes commerciales. De même, les processus d’analyse prédictive viendront nourrir les autres équipes de l’entreprise afin qu’elles comprennent plus finement les conséquences de telles ou telles actions. Par exemple, à partir d’un scénario déterminé par les équipes ventes, les équipes marketing et supply chain pourront ajuster leur stratégie afin d’atteindre leurs objectifs.
Face à la complexité, il n’y a pas de solutions miracles mais des impératifs. Pour survivre, il faut savoir anticiper et s’adapter. Deux défis que le recours à la data permet de relever. A condition d’être valorisée et diffusée au sein de l’organisation !
Tribune rédigé par Ronald Breedveld, Retail & CPG Director et Business Advisor chez SAS
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