A Ciboure, à deux pas du port de Saint-Jean-de-Luz, Guillaume Roget sublime les poissons et les aromates dans une cuisine complexe et ravissante.
Il y a les madeleines de Proust, ces plats qui en une bouchée vous renvoient dans l’enfance, à ces saveurs archivées au creux du cerveau. Et puis, il y a ces sortes de trouvailles archéologiques, des mets qui font ressurgir chez vous des saveurs inconnues, insoupçonnées même, mais qu’ont bien dû connaitre vos ancêtres un jour, du temps où ils étaient plus aventureux dans un monde moins uniforme. A Ciboure, chez le chef Guillaume Roget, sommelier de métier, une étoile au Michelin, la dégustation se fait ainsi, avec un pinceau pour désensabler la langue et des petits marteaux pour creuser le palais. A la table de son Ekaitza, « tempête », en basque, il est moins question de vents brusques et de pluies torrentielles, que de tendres observations loin des modernités accablantes, de leur miso partout et de leur goût nulle part.
Prenons par exemple, cette entrée, une « collection » de tomates, au naturel, avec ses herbes aromatiques puissantes, de la monarde et de la menthe « baume du tigre » acidulées, qui font monter dans le nez des odeurs qui rappellent les bosquets d’aromates des grands-parents, mais en différent, en plus subtil, en plus intense, surtout, en méconnu. En outre, il y a, avec ces tomates, un bouillon de coquillages au lait de coco, infusé à la lavande, autant vous dire qu’on a rarement vu tomate aussi bien trempée, dans une soupe qui a tout d’un manteau de mer, tissé avec des herbes simples qui viennent éveiller des saveurs méconnues, comme des souches néolithiques fossilisées dans notre goût.
Criée de Saint-Jean-de-Luz oblige, voilà venus les poissons : une barbue braisée qui sent le feu de bord de plage, avec ses haricots verts croquants comme un sel de Guérande, sa mayonnaise montée à l’huile de poisson, et son jus de légume réduit au romarin d’Afrique, symbole de la cuisine d’Ekaitza, bavarde et complexe, mais pour le meilleur : surprendre l’attablé. Vient ensuite un terre-mer voluptueux, un merlu confit à la graisse de canard (sud-ouest oblige), avec un jus à l’anis vert et bouillon de champignons qui vous enivre comme une marée basse. Puis arrive un thon rouge, avec son morceau de longe gras comme un boeuf, tendre comme un nuage, et sa ventrêche « oubliée » sur le barbecue, à faire nager dans un jus de volaille parfait de puissance, toujours dans le sillage d’une association exquise d’aromates, qui nous fait dire qu’on n’a, en fait, jamais rien compris, ni aux herbes ni aux salades.
En dessert, c’est un peu moins épatant, mais pas moins délicieux : d’abord des fraises avec un sorbet à l’huile d’olive, puis un biscuit sous des fruits rouges, des pépites de miel soufflé et un sorbet à la framboise, pour construire une fin de repas où on laisse le dernier mot aux fruits et à la saison, sans extravagance.
L’avis de Forbes : inoubliable. Une cuisine surprenante, pleine d’idées délicieuses, impeccable de bout en bout, servie dans un cadre gentiment moderne, au bord de la mer. Un bonheur.
Ekaitza, 15 Quai Maurice Ravel, 64500 Ciboure menu dégustation six temps, à 105 euros,
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