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2022 : La relation client face à une incertitude augmentée

relation client
Photo credit: gordon2208 on Visualhunt ((CC BY-NC-ND 2.0)

Nous assistons tantôt impuissants, tantôt indifférents, tantôt debout contre vents et marées aux grands bouleversements qui touchent les organisations, ces bouleversements ne vont pas sans s’accompagner de promesses faites aux collaborateurs, aux équipes mobilisées sur le front de la relation client ! Les enjeux sont majeurs. Quels que soient les changements les solutions existent, il reste toutefois à les mettre effectivement en œuvre… ou : « quand le dire c’est faire ! »

 

Par Yannick Chatelain :  Professeur Associé Digital / IT, Responsable de GEMinsights Grenoble École de Management (GEM),  Laurent Mandica  : Professeur Associé Relation Client et Management, Grenoble École de Management (GEM).

 

Des managers et des outils !

Des outils d’analyse permettent de saisir les enjeux de ces changements, de ces zones de turbulences parfois prévisibles, parfois soumises… à l’instar de VUCA, pour Volatilité, Incertitude (Uncertainty), Complexité et Ambiguïté, un « outil »  né en 1987 puis publié en 1992 dans un document de recherche d’Herbert F. Barber intitulé « Developing Strategic Leadership: The US Army War College Experience, Strategic Leadership Primer », ce dernier deviendra à cette occasion un nouvel ‘’outil officiel’’ au service des managers permettant d’appréhender un monde en perpétuel mouvement. Un mouvement qui après plus de deux années de crise sanitaire n’a eu de cesse de s’accélérer à laquelle vient désormais s’ajouter un séisme géopolitique européen d’intensité inédite durant ce siècle de « paix »…

Si cet outil – tant d’analyse que de choix multiples – demeure d’actualité et doit permettre de prendre des décisions arbitrées, rapides et efficaces, décisions qui engagent toute une organisation autour d’une mobilisation qui doit faire sens. Au demeurant ce monde en mouvement s’est accompagné de nouvelles mutations que les entreprises doivent intégrer dans leur réflexion – la disruption en est un exemple – des mutations qui s’initient avec leur lot de concepts comme « l’ubérisation », la « Servicisation »… cela ne rend pas VUCA obsolète pour autant… tant s’en faut cet outil fondamental se doit toutefois d’intégrer de nouveaux paradigmes et prendre en compte concomitamment cinq ruptures majeures.

 

Cinq Ruptures majeures qui incident – entre autres – sur la relation client.

Inéluctablement – avec un effet d’accélération lié à la crise que nous avons traversée – les Services deviennent partie intégrante et majeure des nouveaux « tableaux » que nous évoquons (cf. « Servicisation »… ) Comme l’expliquait le physicien Marc Halevy   dès 2017 cinq ruptures majeures sont venues impacter les entreprises et ipso facto la gestion de la relation et de l’expérience client :

  • L’Écologie : la rupture écologique traduit simplement le fait que la raréfaction des ressources matérielles naturelles s’accélère de façon exponentielle sous la double pression d’une folle croissance globale à la fois démographique et consommatoire
  • L’Économie les réseaux bouleversent toutes les dimensions de nos vies. Non seulement du fait des réseaux sociaux, mais surtout parce que le réseau est le modèle émergent de toutes nos organisations sociales et communautaires, professionnelles et entrepreneuriales.
  • L’Organisation : elle signe la fin du modèle économique né avec la révolution industrielle du 19e siècle, et amplifié et formalisé par les managers et économistes américains tout au long du 20èmesiècle. Les deux piliers de ce modèle pouvant résider autour de l’expansion en masse et la baisse en prix (discutable aujourd’hui) .
  • La Technologie : la troisième révolution informationnelle, après celles qui firent passer de l’oral à l’écrit, puis de l’écrit à l’imprimé, nous fait, à présent, passer de l’imprimé au digitalisé.
  • La Philosophie : Marc Halevy nous invite répondre par la Spiritualité. Une spiritualité sans doute assez éloignée des monothéismes d’antan et des religions instituées, sans doute plus contemplative ou méditative, plus pratique que théologique, plus orientale qu’occidentale.

 

Au regard de ces impacts multiples tout le référentiel de service se voit ébranlé. Cela impose aux organisations une remise en question en profondeur… En effet, pour soutenir ses promesses, tenir ses engagements, encore faut-il – plus que jamais sans doute –  que l’ensemble des acteurs contributeurs soient solidaires, concernés et soucieux de la satisfaction du client, et ce, quel que soit leur poste, leur rôle, leur mission. Si dans le contexte que nous décrivons l’on pouvait résumer de façon concise le système dynamique de la Culture d’une entreprise on ne peut qu’y voir en « bout de chaîne de création de valeurs collaborateurs/clients » des comportements et des postures en mesure de traduire des changements de cap, des changements de rythmes, de rites…  la culture et le collectif sont désormais l’alpha et l’oméga de l’amélioration des services.

 

Vers de « nouveaux » modes managériaux de la culture de service. 

Qui dit agilité, fait de changement de cap, de rythme, de rites, de comportements, de postures, comme nous avons pu l’évoquer, nécessite de notre point de vue,  de nouveaux modes managériaux de la Culture de Service. En ces temps où l’incertitude est à son paroxysme, tant sur le terrain sanitaire, que géopolitique et donc… économique. S’il est une quête du graal de la satisfaction client elle ne peut faire abstraction de la montée en puissance de collabor’acteur de l’entreprise, de l’organisation ‘’au service’’ de son client…   

 

Le retour en force du Servant Leadership

Au cœur de cette réflexion, les entreprises gagneraient selon nous à remettre à l’honneur et au cœur de leur réflexion le Servant Leadership tel que l’envisageait Robert Greenleaf en 1970…  pour ce dernier  ‘’’le leader-serviteur est d’abord serviteur (ou au service de)…cette personne est fortement différente de celle qui est d’abord leader…la différence se manifeste dans le soin pris par le leader-serviteur à faire en sorte que les besoins les plus importants d’autres personnes soient servis. Le meilleur test, difficile à réaliser, est de se poser la question ; est ce que ceux qui sont servis grandissent en tant que personnes ? Deviennent-ils, en étant servis, en meilleure santé, plus sages, plus libres, plus autonomes, plus susceptibles eux-mêmes de servir les autres ? ‘’

 

On perçoit naturellement qu’autour de ce renversement de modèle c’est tout le système qui se trouve bouleversé ou peut être remis en ordre de marche… plus encore dans le contexte actuel sensible à toutes les intentions avant même les attentions. Nous passons ainsi d’une « offre de service » à une véritable « relation de service » ;  d’un « égo-système » à une forme d’écosystème davantage porteur de sens et de significations, le servant leadership étant plus que jamais « un levier de management mais également de rentabilité pour l’entreprise » comme le soulignait en 2020 Vincent Giolto.

 

De la remise, de la livraison d’une offre à un client à une véritable posture de service, autour de comportements, d’attitudes, d’attentions et d’intentions au cœur des préoccupations de ceux et celles qui les produisent et les délivrent. Dès lors, ‘’le geste de plus’’, celui qui pourra permettre une attitude de service, celui du leader – non plus charismatique autosuffisant – catalyseur d’excellence dans la relation client et qui devra tout mettre en œuvre pour :

  • Résoudre les irritants opérationnels, tous ‘’ces cailloux dans la chaussure’’ qui sont autant de sources de résistances aux changements, qui font certes avancer, mais parfois en laissant quelques douleurs s’installer.
  • Donner du sens, tout en respectant et vouant la reconnaissance légitime à ses collaborateurs pour entretenir la mobilisation, le plaisir et l’engagement
  • Permettre dans une relation de confiance et de réciprocité une autonomie, celle par exemple ‘’du geste de plus’’ en conformité avec les impératifs de qualité de service, de satisfaction du client et de rentabilité d’une expérience client/collaborateur indélébile.

Comme le disait Robert Greenleaf : « Les bons leaders doivent être d’abord de bon serviteurs » en ces temps extrêmement mouvementés…. cette phrase n’a jamais été autant d’actualité.

 

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