Secousses en vue pour la Chine
En 2000, la Chine représentait moins de 4 % du Produit intérieur brut (PIB) mondial, aujourd’hui, près de 20 %. Ce retour express au sommet de la compétition économique a été orchestré, étape après étape, de main de fer par Pékin. Il pourrait toutefois se heurter en 2022 à un faisceau de vents contraires. Les perspectives de croissance de la deuxième économie mondiale apparaissent d’abord fragilisées par les difficultés des promoteurs immobiliers. Après avoir bénéficié pendant des années de l’élan frénétique de construction qui s’était emparé de l’ensemble du pays, les groupes peinent désormais à boucler leurs programmes. À la sortie des confinements, les conditions de financement des ménages se sont en effet dégradées. Les paiements rentrent moins bien et, alors que la dette totale du secteur est évaluée à près de 3000 milliards de dollars, toute la chaîne de l’immobilier, jusqu’au vaste secteur financier, pourrait se trouver menacée. Un décrochage de l’immobilier fragiliserait également les équilibres politiques du régime ; les gouvernements locaux, très endettés, se finançant essentiellement grâce aux retombées de l’immobilier. Pékin tente pour l’instant de contenir la déflagration en reprenant en main les sociétés défaillantes, mais la mission pourrait s’avérer plus complexe qu’anticipé.
Le deuxième sujet d’inquiétude tient à l’évolution du secteur de la Tech. En raison de sa rivalité avec Washington, le gouvernement chinois incite depuis quelques mois ses champions à chercher des financements sur ses propres places boursières (Hong Kong, Shanghai, Shenzhen ou Pékin) quitte à abandonner les bourses américaines. Cette volonté de repli qui limitera nécessairement les échanges technologiques entre les deux mondes pourrait à terme handicaper le développement de l’innovation des deux côtés du Pacifique. La volonté de Pékin de reprendre le contrôle politique sur ses entreprises emblématiques, illustrée par la mystérieuse disparition pendant trois mois de l’entrepreneur Jack Ma, fait encore peser une chape de plomb sur les épaules des dirigeants du secteur. D’autant que les intentions de Xi Jinping ne sont pas explicitement énoncées. Souhaite-il limiter la dépendance du pays aux géants de la Tech ? Remettre de la concurrence au sein du secteur ? Mettre au pas des patrons vedettes ? Sans doute un peu de tout cela.
Pékin a enfin clairement changé son fusil d’épaule sur le terrain houleux des relations internationales. Place désormais au repli, alors que depuis son entrée à l’OMC en décembre 2001, l’économie chinoise tenait une place prépondérante dans le commerce mondial. Xi Jinping avait même théorisé, lors de son arrivée au pouvoir en 2013, une stratégie d’expansion via un vaste réseau d’infrastructure planétaire. Baptisé les nouvelles routes de la soie, ce réseau devait acheminer les biens fabriqués en Chine aux quatre coins de la planète. Or la donne a également changé sur ce point. La priorité n’est plus à l’expansion mais au recentrage national. Pour les pays émergents, qui subissent déjà de plein fouet la hausse des prix alimentaires, le retrait chinois ressemble à une double peine.
Propos recueillis entre le 6 et le 7 décembre 2021.
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Les analyses et les opinions mentionnées représentent le point de vue de l’auteur. Elles ont été émises entre le 6 et le 7 décembre 2021et sont susceptibles d’évoluer. Elles ne sauraient être interprétées comme possédant une quelconque valeur contractuelle.
Article rédigé par Philippe Waechter (Ostrum AM)